Ukraine : risque de Troisième guerre mondiale ou surenchères avant la négociation ?
Dans la nuit du 19 novembre, après des mois de discussion, les États-Unis ont autorisé l’Ukraine à frapper des cibles dans les Oblast russes de Briansk et Koursk avec des missiles ATACMS, livrés par Washington. Le 20 novembre, c’est la France et la Grande Bretagne qui ont autorisé Kiev à lancer des fusées SCALP-EG et Storm Shadow sur les oblasts russes. Le lendemain, la Russie a tiré sur l’Ukraine un missile à moyenne portée (IRBM) hypersonique « Orechnik » (« Noisetier »), conçu pour transporter une tête nucléaire. Le L’IRBM a frappé l’usine Pivdenmash de Dnipro, où l’URSS produisait des fusées pour les programmes de missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) et spatiaux.
Mais le message subliminal était clairement adressé aussi à l’Occident. Le Kremlin a dénoncé une « escalade » de la guerre et a rendu public un ajustement de sa doctrine nucléaire (annoncée depuis des mois) : la Russie pourra répondre avec des armes nucléaires même aux attaques conventionnelles. Moscou a surtout fait clairement comprendre que les dispositifs militaires occidentaux postés en Pologne ou ailleurs et qui alimentent en armes l’armée ukrainienne dans ses actions sur le territoire russe pourraient être frappés, ce qui fait sauter potentiellement un ultime tabou. « Nous nous considérons pleinement fondés à employer nos armes contre les infrastructures militaires des pays qui autorisent l’usage des leurs contre nos propres installations », a précisé Vladimir Poutine après avoir qualifié l’Orechnik d’invincible et capable de frapper n’importe quel pays européen.
La situation est-elle si grave qu’il y paraît ? Certains vont jusqu’à parler de Troisième guerre mondiale, comme le général Valeri Zaloujny (ambassadeur à Londres et ex-chef de l’armée ukrainienne), ou encore le président polonais Donald Tusk. En fait, le nombre d’ATACMS à disposition de l’Ukraine n’est pas illimité, et l’armée russe a abattu 5 des 6 projectiles le premier jour de leur utilisation… Officiellement, leur autorisation d’employer des ATACMS contre le sol ruse serait une réponse à l’arrivée de milliers de soldats nord-coréens (équipés de 70 pièces d’artillerie) dans la région de Koursk puis aux bombardements russes (drones et missiles) contre des infrastructures énergétiques et industrielles en Ukraine (Kiev, Soumy, Odessa, Lviv). En réalité, avec un rayon d’action de 300 kilomètres, ces ATACMS – qui ne peuvent pas atteindre Moscou – ne changeront pas l’issue des opérations militaires qui penchent en faveur des Russes. Et il n’est pas impossible qu’avant la prise de fonctions de Donald Trump le 20 janvier 2025, l’armée russe aura acquis le maximum d’avantages.
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