Pakistan-Indonésie : l’accusation-miroir des pays islamiques christianophobes qui accusent l’Occiden
De la condamnation à mort (en 2010) d’Asia Bibi au Pakistan, à la condamnation d’Ahok en 2017, en Indonésie, les exemples sont pléthores de persécutions de chrétiens, brimés, soumis, humiliés, assassinés non seulement par des groupes terroristes comme au Nigéria, en Irak ou en Syrie, mais souvent aussi condamnés à mort de façon tout à fait « légale » par des juridictions d’Etats parfois même « amis » de l’Occident (Arabie Saoudite, Turquie, Qatar, Maldives, Indonésie, Malaisie, Bengladesh, etc). Curieusement, l’Occident qui feint de combattre les terroristes de Daech (« coupeurs de têtes »), se laisse intimider depuis des décennies par les tout aussi islamistes « coupeurs de langues », qui les accusent de faire ce dont les pays islamiques sont carrément fiers : exclure, persécuter, inférioriser et parfois tuer leurs minorités religieuses ou ethniques. Alors que les Occidentaux intimidés par cette stratégie fondée sur le couple diabolisation-culpabilisation ne cessent de donner des gages et « preuves » d’islamically correctness », les 57 pays de l’Organisation de la Coopération Islamique (Pakistan, Indonésie, Turquie, Arabie saoudite en tête), adeptes d’un suprémacisme islamiste totalement déculpabilisé, ne cessent de faire passer des résolutions condamnant « l’islamophobie » des Occidentaux, via les « Comité » et « Commission » des droits de l’homme des Nations Unies, via les lobbies pro-islamiques du Conseil de l’Europe ou de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), cette dernière a d’ailleurs récemment confirmé une condamnation d’une autrichienne coupable d’avoir dressé un portrait insultant de Mahomet. Pour prendre conscience de cette guerre asymétrique livrée par les puissances islamiques obscurantistes et néo-impériales, Alexandre del Valle revient sur deux des trois plus grands pays musulmans du monde, réputés jadis « modérés » et amis de l’Occident : le Pakistan et l’Indonésie, membres de l’OCI et pays emblématiques du processus de réislamisation anti-occidental et christianophobe qui ne touche pas que les pays arabes, loin s’en faut.
Le cas d’Asia Bibi ou la christianophobie pathologique du « pays des purs »
Depuis sa condamnation à la peine de mort par pendaison en 2010 - comme le prévoit la Charià appliquée au Pakistan en matière de « blasphème » - la mère de famille chrétienne Asia Bibi, accusée d’avoir «blasphémé» en buvant de l’eau d’un puits avec le même verre qu’une musulmane (pourtant sa collègue de ramassage de légumes) puis en ayant avoué à cette dernière sa foi chrétienne, vit l’enfer total depuis dix ans. Privée de son mari, qui tente de la défendre depuis l’Angleterre, où il a dû s’exfiltrer pour échapper au courroux des fanatiques, Asia Bibi croupissait en prison dans l’isolement total en attente des recours possibles jusqu’à ce qu’elle soit finalement acquittée par la cour suprême. On aurait pu croire que l’affaire allait bien se terminer et que cette martyre chrétienne dont le monde occidental relaie (pour tant d’autres cas ignorés) le calvaire depuis 10 ans allait enfin pouvoir gagner l’Europe. Mais cela aurait été trop beau et trop facile…. dans ce pays parmi les plus fanatiques et violents du monde. Pour certains, son emprisonnement aurait été jusqu’à présent le « meilleur moyen de la protéger » des millions d’islamistes pakistanais qui ont juré de faire appliquer sa peine en la faisant pendre coute que coute. En vérité, pressées par les organisations internationales et les Occidentaux (pour une fois impliqués) de libérer Asia Bibi, les autorités pakistanaises n’ont cessé de repousser l’application du jugement tout en tentant de calmer la « colère » des très puissantes organisations islamistes radicales du pays. Ces dernières ont d’ailleurs assez efficacement menacé de mort ou fait assassiner tous ceux qui ont, soit critiqué la loi anti-blasphème pakistanaise qui a fait condamner Asia Bibi, soit tenté de défendre cette « chrétienne-blasphématrice ». Comme nous l’avons maintes fois expliqué dans nos ouvrages, notamment le dernier*, cette stratégie de l’intimidation a déjà conduit à l’assassinat des (rares) téméraires défenseurs d’Asia Bibi : l’ex-ministre (chrétien) Shahbaz Bhatti, en charge des minorités, et le musulman modéré Salmaan Taseer, ex-gouverneur du Penjab, tous les deux assassinés… Bienvenus dans le « pays des purs »… Telle est en effet la signification littérale du nom « Pakistan », cet étrange pays (créateur/parrain des Talibans afghano-pakistanais, d’Al-Qaïda et de moult groupes islamo-terroristes du Cachemire) qui a été édifié pour et par les musulmans du sous-continent indien qui ne voulaient pas d’une Inde post-coloniale dominée par les « infidèles hindouistes» et qui ont - de ce fait - obtenu la séparation- du Pakistan occidental (Pakistan) et « oriental (Bengladesh) de l’Inde, afin que « seuls des musulmans commandent des musulmans », comme l’exigent la Charià et le Coran (III,103). Rappelons que les chrétiens représentent au Pakistan environ 1,5 % de la population, soit 2,5 millions d’âmes, dont 1 288 000 de Catholiques, le reste étant des églises orientales et des protestants.
Stratégie de l’intimidation : Un pays plongé dans le chaos parce qu’une « blasphématrice chrétienne n’est pas pendue…
Parfaitement conscient du caractère « sérieux » des menaces des islamistes décidés à faire pendre non seulement Asia Bibi mais tous les « traitres-Apostats » qui ont osé la défendre, l'avocat qui a réussi à la faire acquitter Asia Bibi, Saif-ul-Mulook, a dû lui aussi fuir le Pakistan le samedi 3 novembre, après avoir reçu moult menaces de mort de la part de barbus enragés. "Dans le scénario actuel, il ne m'est pas possible de vivre dans mon pays le Pakistan (…) Je m'y attendais, mais ce qui est douloureux, c'est la réponse du gouvernement. Ils ne peuvent même pas (faire) appliquer un jugement de la plus haute cour du pays", a déploré Mulook. Mais la fuite de l’avocat n’a pas « calmé » la colère des irascibles obscurantistes : c’est ainsi que des millions d’islamistes sont descendus dans les rues afin de paralyser la moitié du pays trois jours durant : autoroutes bloquées, réseaux téléphoniques coupés, voitures et motos saccagées, agglomérations paralysées, écoles fermées dans de nombreuses villes, plusieurs agressions violentes et meurtres. À Lahore et à Karachi, la capitale économique, les grands axes des routes et autoroutes sont restés fermés trois jours à la circulation. Les manifestations y ont littéralement bloqué l'activité économique, ce qui a représenté des milliards de pertes pour les entreprises et l’Etat. A Islamabad, vendredi après-midi, l'avenue qui mène au Parlement a été prise d'assaut par une foule enragée. Le discours de fermeté prononcé mercredi soir par le Premier ministre Imran Khan contre « les extrémistes », à qui il a assuré que l'Etat ne "tolèrerait pas le sabotage" et "prendrait ses responsabilités", n’a eu aucun effet dissuasif face à la dissuasion plus grande encore de millions de « musulmans en colère » assoiffés de vengeance dans un pays piégé par ses propres lois chariatiques totalitaires. L'un des chefs de file des manifestants a même appelé les « croyants » à assassiner les juges de la Cour suprême qui ont acquitté Asia Bibi puis incité les militaires à provoquer des mutineries au sein de l'armée, le cœur du régime. A Islamabad, 5000 islamistes ont ainsi réclamé la pendaison d'Asia Bibi et des juges, tous qualifiés de "blasphémateurs". En toute logique totalitaire, ils ont affirmé que "libérer Asia est un premier pas vers une abrogation de la loi sur le blasphème au Pakistan. L'Occident a toujours essayé de modifier cette loi mais nous résisterons". Cette dernière remarque est assez habile car elle consiste à faire passer des mesures telle que l’égalité musulmans-non-musulmans pour de « l’inféodation envers l’Occident ». Derrière ces violentes protestations anti-Bibi organisées dans tout le pays se trouvait le très radical et puissant parti islamiste Tehreek-e-Labaik Pakistan (TLP), dont l’un des chevaux de bataille est justement la « défense de la peine de mort contre le blasphème » au nom de la loi islamique. On se rappelle que le TLP avait déjà bloqué en novembre 2017 l'accès à Islamabad pendant plusieurs semaines pour le même motif de « défendre la pénalisation du blasphème » et de la charià. Cette stratégie de l’intimidation (religieuse, psychologique, juridique et physique) a d’ailleurs « bien » fonctionné puisqu’elle a conduit à la démission du ministre de la Justice. Face à des risques de déstabilisation plus graves encore et à la paralysie économique du pays, le gouvernement a finalement, à travers son ministre des Affaires religieuses, Noor-Ul-Haq Qadri, dû faire des concessions envers les obscurantistes : l’accord en « cinq points » prévoit notamment « une procédure visant à inscrire le nom d’Asia Bibi sur une liste de personnes empêchées de quitter le territoire » et une « requête en révision du jugement de la Cour suprême », ce qui revient à la laisser encore croupir (et peut-être mourir) en prison ou à être assassinée si elle retrouve sa liberté… Retour à la case départ…
D’Asia Bibi au Pakistan, à Ahok en Indonésie, ou le mythe de la « tolérance de l’islam asiatique ».
En Indonésie, plus grand pays musulman au monde (avec 230 millions de Mahométans sur une population totale de 260 millions), les chrétiens, qui forment 9% du total, totalisent 24 millions d’âmes. La philosophie de ce pays, jadis réputé adepte d’un « islam modéré », est toujours (sur le papier) la « Pancasila » (doctrine stipulant que l’Indonésie est « unie », pratique la « justice sociale » et reconnaît comme égaux musulmans, chrétiens et bouddhistes). Toutefois, dans la réalité, et surtout depuis une trentaine d’années, certains sont « plus égaux que d’autres »... En effet, l’Indonésie, en pleine mutation identitaire, est devenue, sous la quadruple influence du wahhabisme saoudien, des Frères musulmans, de l’islam pakistanais et de dirigeants « identitaires » de plus en plus islamiques et anti-occidentaux, un Etat intolérant envers les non-musulmans en général et envers les chrétiens en particulier. On se rappelles des massacres de dizaines de milliers de chrétiens aux Moluques dans les années 1990-2000 et des conversions forcées. Au se rappelle aussi qu’au nord de l’île de Sumatra, dans la province d’Aceh, la charià est en vigueur depuis 2002. Devenue la « source de la loi », cette charià permet à une « police religieuse » à la saoudienne et à des juges s’étant fait pousser la barbe de réprimer les « blasphémateurs », « apostats », « adultères », « fornicateurs » et autres « ennemis de l’islam », puis de prononcer des « châtiments corporels ». Les Chrétiens sont bien sûr des cibles de choix. D’après le dernier rapport annuel de l’AED (l’Aide à l’Église en détresse), l’Indonésie est entrée dans le funeste peloton de tête des pays musulmans les plus intolérants avec l’Arabie saoudite, l’Iran, le Pakistan, le Soudan, la Malaisie, les Maldives, la Mauritanie, etc.
La figure emblématique de l’ex-gouverneur chrétien de Jakarta, condamné pour « blasphème »
L’évènement qui a permis d’en prendre conscience, outre les terribles pogroms anti-chrétiens qui ont endeuillé les années 1990-2000, a été la condamnation à deux ans de prison (9 mai 2018) du chrétien indonésien (issu de la minorité chinoise) Basuki Tjahaja Purnama, dit « Ahok », ex-gouverneur de Jakarta et ex-candidat à la présidence du pays. Encore très populaire il y a peu, celui qui aurait pu devenir le premier président « sino-chrétien » (donc doublement minoritaire) d’Indonésie a été opportunément condamné (« blasphème et corruption »), puis écarté du jeu politique sous l’accusation d’avoir « offensé la religion musulmane ». Tout remonte à un meeting en septembre dernier 2017, lorsque, dans le cadre d’une campagne en vue de sa réélection au poste de gouverneur de Jakarta, Ahok a affirmé dans un meeting que son rival avait « tort » d’affirmer au nom du coran qu’un non-musulman ne pouvait pas gouverner les musulmans. Comme Asia Bibi au Pakistan, Ahok a été dénoncé pour « blasphème », et un procès s’en est suivi qui l’a fait condamner à une peine de prison et de non-éligibilité. Et comme au Pakistan, des millions de musulmans fanatiques et violents ont défilé dans la rue pour menacer ceux qui le défendaient, puis pour exiger une condamnation définitive plus lourde de ce « mécréant ennemi de l’islam ». La diabolisation d’Ahok a poussé des millions de musulmans crédules à voter contre lui et à faire élire son adversaire islamiste, Anies Baswedan, devenu ainsi le nouveau gouverneur de Jakarta. Quant au verdict du procès, il a durci la peine réclamée par l’accusation. Là aussi, la stratégie de l’intimidation des « coupeurs de langue », adeptes du « jihad by courts » et des menaces, a été efficace, d’autant qu’en de tels circonstances, l’épée de Damoclès islamiste des « coupeurs de têtes » n’est jamais loin et constitue un facteur dissuasif… Certes, la Chine a officiellement protesté en défendant Ahok (chrétien et chinois d’Indonésie) et en affirmant que ce cas de christianophobie était doublée d’une persécution anti-chinoise, mais rien n’a fait revenir en arrière les autorités indonésiennes. Ahok a perdu désormais toute chance de succéder au président Joko Widoda, dont il fut le dauphin et le vice-gouverneur à Jakarta.
Comme au « pays des purs », l’enseignement de la haine envers les non-musulmans, accentuée par le double phénomène de l’anti-occidentalisme post-colonial (nouvelle christianophobie) et la réislamisation mondiale, a pour première victimes les parias les plus nombreux et jugés les plus dangereux car « contagieux » (crainte du prosélytisme) : les Chrétiens. N’oublions pas que l’essentiel de l’islam sud-est-asiatique est d’ethnie « malaise » (Malaisie, Indonésie, Sigapour, principalement), la culture malaise, jadis bouddhiste et hindouiste, comme au Cambodge, s’étant islamisée entre les XIVe et XVIIIe siècles, via les réseaux commerciaux et les pirateries musulmanes ou « jihad maritime ». Souvent membres d’ethnies minoritaires chinoises, les chrétiens d’Indonésie et de Malaisie sont doublement rejetés ou persécutés (comme non-musulmans « agents des croisés occidentaux ») et comme minorités ethniques accusées de menacer « l’unité nationale ». Dans ce pays faussement adepte d’un islam « modéré », les chrétiens sont régulièrement victimes de procès injustes et kafkaïens. Les massacres de familles chrétiennes entières, surtout lorsqu’elles sont isolées, les viols de vierges chrétiennes (comme au Pakistan ou en Egypte), y sont monnaie courante et le plus souvent impunis. Sans oublier les conversions forcées et autres humiliations. On peut citer par exemple les attentats-suicides qui ont frappé ces dernières années des fidèles chrétiens en pleine messe dominicale, comme à Surabaya (vingt morts). Dans ce pays, plusieurs centaines de chrétiens meurent ainsi en martyrs chaque année dans l’indifférence des « lanceurs d’alertes » et « antiracistes » européens dont la vigilance est plus que variable et dont les médias de référence préfèrent faire la Une avec le « danger des populistes islamophobes »…
*Dernier ouvrage paru, La stratégie de l’intimidation, du terrorisme jihadiste à l’islamiquement correct », L’Artilleur, 2018.
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