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De la Russie à l’Occident : la globalisation du djihad contre « mécréants » et « apostats »

CHRONIQUE. On a trop longtemps oublié en Occident que les ennemis premiers de l’Etat islamique sont, avant Israël : la Russie, les républiques d’Asie centrale, l’Inde, l’Iran, et bien sûr la France laïque et ex-coloniale, rappelle Alexandre del Valle.





Avec 140 morts, cet attentat, semblable au Bataclan de par la méthode, le nombre de morts, les dysfonctionnements des forces de l’ordre, rappelle que l’EI s’est reconstitué en Asie centrale après son affaiblissement en Syrie-Irak, et qu’il peut frapper partout où l’on baisse la garde. Rappelons que le Tadjikistan, qui fait face depuis trois décennies à une radicalisation croissante, réprime d’une main de fer l’islamisme tant djihadiste que politique (Parti de la Renaissance islamique interdit, barbes coupées, voiles intégrales, prénoms arabes interdits).


Aguerris en Afghanistan contre les Soviets, puis contre les dirigeants « apostats » d’Asie centrale et leur parrain russe, nombre d’entre sont montés en grade au sein de l’EI en zone « Syriak ». Un ex-colonel des forces spéciales de la police tadjike (OMON), Gulmurod Khalimov, est d’ailleurs devenu en 2015 le « ministre de la guerre » de l’EI, en succession d’Abou Omar al-Chichani, le djihadiste tchétchène tué par une frappe aérienne en Irak en avril 2017. Le contentieux entre la Russie est ancien et lourd, comme l’a rappelé le texte de revendication de l’EI-K via l’agence de Daech Amaq, en rappelant la Russie a fait couler du de sang musulman en Afghanistan, en Tchétchénie ou en Syrie.


On a trop longtemps oublié en Occident que les ennemis premiers de l’EI sont, avant Israël : la Russie, les républiques d’Asie centrale, l’Inde, l’Iran, et bien sûr la France laïque et ex-coloniale. L’Iran chiite et la Russie, qui ont soutenu la Syrie de Bachar al-Assad, sont des cibles privilégiées des djihadistes tchétchènes, caucasiens ou autres ressortissants d’ex-républiques soviétiques.


Depuis l’attentat du métro de Saint Pétersbourg en 2017 (15 morts), celui de Kerman le 3 octobre 2024 (Iran), lors de la commémoration de la mort du général Suleymani (89 morts), ceux contre l’ambassade de Russie en 2021 à Kaboul et de l’aéroport de Kaboul (170 morts locaux et 13 morts américains), et celui de Moscou le 22 mars dernier, Daech/EI-K a démontré qu’il peut frapper partout où il veut, tant de façon directe (attentats inspirés, avec mode d’emplois, kit d’entraînement et de préparation sur le dark web) que « projetée ».

Andrei Serenko, directeur du Centre d’Analyse de la Société russe des sciences politiques, alertait ces jours-ci que l’EI-K vient d’achever une campagne de recrutement parmi la diaspora tadjike et centre-asiatique ou caucasienne de Russie, d’Ukraine, de Turquie et d’Europe. Ces dernières années, plusieurs complots de l’EI-K ont démantelé en Europe : le 19 mars 2024, la police allemande a arrêté deux de ses membres accusés d’avoir essayé d’attaquer le parlement suédois.


En juillet 2023, dans la région de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, les polices allemande et néerlandaise ont arrêté neuf personnes en contact avec l’IS-K. En 2023, l’EI-K a menacé d’attaquer les Pays-Bas, le Danemark (caricatures de Mahomet), la Suède, (affaire des Coran brûlés). Avec ses appels à frapper partout «juifs, musulmans « apostats » et « chrétiens », l’EI est sans conteste l’organisation islamiste la plus globalisée.


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