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Alexandre del Valle : Le discours de Macron sur la menace russe et la dérive oligarchique-populicide de l’Union européenne

CHRONIQUE La démocratie est en danger en Europe. Depuis la crise du Covid, tous les prétextes sont bons aux élites autoproclamées pour restreindre les libertés individuelles et publiques. C’est ce que démontre notre chroniqueur Alexandre del Valle.  





Dans son discours du 5 mars dernier, Emmanuel Macron a justifié un effort de défense accru (et légitime) au nom de la lutte contre la menace russe. Celle-ci serait matérialisée par les « manipulations » de l’opinion et des élections, les « attaques » cyber, sur terre et sur mer ; le fait que la Russie fabrique quantité d’armes, et les ingérences. Face à « ce monde de dangers, rester spectateur serait une folie », a-t-il déclaré sur un ton solennel. Pour le président, nous avons besoin de « décisions sans précédent », notamment la réduction de la liberté d’expression pour « défendre la démocratie » et « une certaine idée de la liberté d’expression ». Dans la plus pure tradition orwellienne de 1984, Emmanuel Macron a rappelé que la vérité ne peut pas être n’importe quelle vérité. Cette Pravda ou vérité d’État, jadis dictée par l’État fédéral soviétique, sera bientôt celle des pays de l’État proto-fédéral européen, en croisade contre les “ingérences russes” et les fake news. Pour notre Jupiter national, le “retour de la guerre” en Europe justifie donc une réduction des libertés et, de façon implicite, des avantages sociaux, puisque des sacrifices seront nécessaires pour doubler le budget de la défense.


Covid et libertés


Après les mégarestrictions de libertés publiques et individuelles de la période Covid, nous voici arrivés dans l’ère de la postdémocratie et du mind control au nom de la lutte contre l’ennemi russe. À cet égard, l’arrestation de Călin Georgescu en Roumanie, puis son interdiction de se présenter aux élections, sont des événements d’une extrême gravité. L’interdiction de Georgescu en raison de ses opinions politiques et de son supposé positionnement prorusse est une atteinte sans précédent au fondement même de la démocratie libérale et parlementaire. L’autre grand exemple, en 2012, fut la confiscation de la candidature de François Fillon, qui avait laissé la voie libre à Hollande et à Macron. Fillon avait d’ailleurs lui aussi été accusé d’être “prorusse”, comme Viktor Orbán en Hongrie, comme son homologue Robert Fico en Slovaquie et comme la plupart des souverainistes occidentaux. Ces accusations sont de plus en plus utilisées comme justification pour exclure du débat public les voix dissidentes. Cette idée est fortement présente dans la rhétorique d’Emmanuel Macron ou dans les déclarations de l’ex-commissaire européen Thierry Breton, lequel avait justifié l’annulation du premier tour de l’élection présidentielle en Roumanie après avoir demandé de faire interdire X (ex-Twitter) dans l’Union européenne, avant d’être recadré par la présidence de la Commission…


Un espion russe en Roumanie ?

En Roumanie, l’affaire est au centre d’une immense polémique. Les services secrets roumains n’ayant pas réussi à avancer les preuves que Georgescu serait un « espion russe, ex-officier du KGB », on raconte depuis quelques jours que les “preuves” seraient venues depuis la France, puis que la décision d’interdiction viendrait de la Commission de Bruxelles. Toujours est-il que le précédent est extrêmement dangereux, car désormais, des personnalités dérangeantes risquent de plus en plus d’être exclues du processus politique non pour des actions criminelles concrètes, mais simplement pour leurs opinions ou alliances politiques.


L’accusation d’être proche de la Russie, le refus des “ingérences”, des fake news et la chasse aux “complotistes” seront de plus en plus, comme l’a laissé entendre Emmanuel Macron, des prétextes pour étouffer la liberté d’expression et confisquer ou annuler des élections. S’il s’avère que Georgescu a vraiment été un agent russe, son arrestation est compréhensible. Toutefois, s’il s’avère un jour que les preuves ont été fabriquées, il n’y aura pas lieu d’être surpris, car pour l’Otan et l’Union européenne, il n’est même pas envisageable que la plus importante base de l’Otan en Europe de l’Est, aux portes de l’Ukraine face à la Russie, soit remise en question.


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